Mis à jour le 28 juin 2016

L’organisation d’une réponse locale face aux défis écologiques et sociaux. Article rédigé par Linda Delory, étudiante de la Spécialité Affaires publiques et Gestion des Biens Communs issus de la Majeure Développement soutenable de Sciences Po Lille.

Le jardinage comme projet sociétal

Tandis que le contexte du changement climatique, de la finitude des ressources fossiles et de la croissance des inégalités sociales obligent à repenser notre rapport à la production et à la consommation de nourriture, certains œuvrent à la mise en place d’un nouveau « paysage alimentaire ». L’art de cultiver son jardin est ainsi au cœur de l’initiative des Anges Gardins (signifiant jardin en chti), projet faisant de l’alimentation un vecteur à la fois de réinsertion sociale, de relocalisation économique, de santé et de bien-être général.

Ecopole Alimentaire

Un projet aux fonctions multiples

Fondée en 2011 et s’étendant sur une ferme de 5 hectares située à dix minutes de Calais, l’association des Anges Gardins œuvre en effet à repenser notre modèle agricole afin de tendre vers« une alimentation saine, à faible impact environnemental, à faible coût, tout en étant inclusive, créatrice d’emplois et porteuse d'activité dans des zones rurales en difficulté ou pour des personnes peu qualifiées ». La réinsertion est ainsi au cœur de la démarche, avec plus de 48 personnes ayant pu bénéficier de ce dispositif depuis le début du projet et la moitié des personnes aujourd’hui parties ayant trouvé par la suite un emploi ou une formation qualifiante. L’un des pôles au cœur du projet est de favoriser l’accès aux savoir-faire de base en matière d’autoproduction vivrière et culinaire, cet apprentissage prenant notamment la forme d’ateliers de cuisine et de jardinage, ainsi que par la publication de manuels et d’ouvrages de capitalisation (par exemple le précieux « manuel des jardiniers sans moyens »). L’idée est que chacun puisse apprendre à cultiver des légumes, mais également à les cuisiner et à les conserver. La mise en œuvre de ce projet passe par une volonté d’optimisation de l’espace, le but étant qu’une personne avec même un accès très limité à un jardin puisse cultiver quelque chose, vision efficiente se plaçant dans la lignée de l’agriculture urbaine.

Une intention de répondre aux professionnels et aux individus

En effet, l’idée des Anges Gardins émergea alors que les trois fondateurs Dominique Hays, Régine Pattyn et Abdelhafid Djelad se rendirent à Cuba et à New York et y découvrirent des jardins communautaires florissants au coeur des villes. Le projet put ensuite se développer grâce à la Communauté de Commune de la Région d’Audruicq qui souhaitait la mise en place d’un pôle de ressource que les partenaires qualifieront d’un « Ecopôle Alimentaire », et se développa sous la forme de deux outils associatifs : Terre d’Opale pour la plateforme de distribution de produits locaux et bios et les Anges Gardins, pour l’insertion et l’éducation à la diversité alimentaire.
Le projet est aujourd’hui subventionné notamment par l’Union Européenne à travers le fond social européen, l’Etat (PNA, notamment), la Région Nord-Pas-de-Calais et le Département du Pas de Calais par plusieurs fondations dont la Fondation de France, Daniel et Nina Carasso et revendique une démarche s’insérant dans l’économie sociale et solidaire, rendant possible « la réinvention sur toute la chaîne de valeurs. »

En marche vers l’autonomie alimentaire avec et aux bénéfices des étudiants

Le projet EnMarche (acronyme de « Expérimentation de Nouveaux Modes d'Alimentation et Recherche sur les Comportements Habituels et leur Evolution), porté à la fois par les Anges Gardins et le Ceraps, laboratoire de recherche de l'Université Lille 2, est une formation à l’autonomie alimentaire destinée à des étudiants. C’est un exemple d’analyse des progressions constatées à l’issu des actions d’éducation à la diversité alimentaire. Durant une année universitaire, la plateforme de production de produits régionaux et solidaires Terre d’Opale pourvoit les étudiants inscrits avec un panier issu de l’agriculture biologique par semaine durant, et une diététicienne organise un atelier de cuisine mensuel. Par ailleurs, une récolte de tous leurs tickets de caisse est établie afin d’analyser chaque dépense alimentaire, et le projet se poursuit l’année suivant la formation sous forme de questionnaires et d’entretiens recensés par une sociologue de Lille 2. Il s’agit ainsi à la fois de former les étudiants mais aussi d’analyser l’évolution des comportements alimentaires et de juger de l’impact d’une formation qui se veut globale sur les habitudes liées à la nourriture. En effet les Anges Gardins s’attaquent à la difficulté de changement de comportement alimentaire, en prônant la découverte du caractère multidimensionnel de l’alimentation (à la fois social, économique, culturel, etc.).

Comité de Promotion Economique et Tourisme Intercommunal

Une volonté de transmission

Un des autres grands projets des Anges Gardins est celui des Ambassadeurs du jardinage et du bien-vivre alimentaire. Ce projet phare de l’association, a été créé en 2010 en partenariat avec deux autres structures, l’association Au ras du Sol en Aquitaine d’une part, et Le Mat en Ardèche d’autre part. Elle est à destination de professionnels tels que des animateurs sociaux ou de personnes ayant un projet d’activité, mais s’ouvre également de plus en plus à des personnes en recherche d’emploi. L’ambassade propose un espace de travail et d’échange, ainsi que des supports de travail en diffusant en licence libre à la fois manuels, fiches, et autres outils pédagogiques. Les ambassadeurs sont ensuite capables de se réapproprier la méthode pour diffuser la méthode comme ils le souhaitent (ballades en nature et cueillettes sauvages, ateliers de cuisine bimensuels, distribution d’herbes aromatiques etc...). En 2014, l’ambassade comptait plus de 180 ambassadeurs, tous référencés.

Un projet porteur de bien-être général et de convivialité et une réponse aux besoins de tous

On peut noter que les notions de bien-être et de convivialité sont également très présentes dans la démarche de cette association. Au-delà de combler le besoin de l’emploi, l’acte de jardiner comporte en lui-même de grands bénéfices pour le bien être. Ainsi, cultiver son jardin au fil des saisons, retrouver le contact avec la terre et le plaisir de cuisiner est une façon de rentrer en contact avec soi et selon Justine Moron, actuelle chargée de mission Anges Gardins et Ambassadeurs Alimentaires, ces activités développent des effets positifs sur l’estime de soi et le bien être psychique. Nous voyons ainsi que l’alimentation est plus que jamais au coeur de nombreux enjeux de ce siècle. En proposant un schéma de résilience donnant la capacité aux gens de reprendre leur autonomie, les Anges se font ainsi les Gardiens d’un nouvel horizon alimentaire, tentant de satisfaire l’ensemble des besoins essentiels dans une approche holistique, c’est-à-dire considérant les différents aspects de la vie sociale comme solidaires et écosystémique.

Rédaction : Article rédigé par Linda Delory, étudiante de la Spécialité Affaires publiques et Gestion des Biens Communs issus de la Majeure Développement soutenable de Sciences Po Lille. Entretien mené avec Justine Moron, chargée de mission les Anges Gardins et Ambassade Alimentaire.

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