Mis à jour le 11 octobre 2021

La mise en place d’un projet alimentaire territorial (PAT) est un véritable marathon, et certainement pas un sprint. Comment lever les craintes de ceux qui les portent, accepter le temps long, et surtout, travailler ensemble, en impliquant citoyens, élus, agriculteurs, entreprises… ? Ce sont ces questions que le Cerdd a soulevées jeudi 16 septembre 2021 au cours d’une journée d’accompagnement collectif.

Sur la table, de petites affichettes : des craintes couchées sur papier. Ici, la peur exprimée de « ne pas réussir à mobiliser les habitants et les acteurs locaux », là, la crainte de « rester entre experts ou personnes convaincues »... Venus de Saint-Quentin, de Lille, de Saint-Omer ou encore d’Amiens, une vingtaine de participants des Hauts-de-France se sont rassemblés à Loos-en-Gohelle (62) jeudi 16 septembre 2021 dans les locaux du Cerdd. Cette rencontre entre élu·es et technicien·es de collectivités s’organisait dans le cadre d’un accompagnement collectif, qui les a déjà rassemblés trois fois auparavant. Et, avant toute chose, ils ont donc exprimé leurs... craintes.

Car non, la mise en place d’un PAT sur un territoire n’a rien d’un long fleuve tranquille. Une fois cela en tête on peut embarquer plus sereinement et… tenter de faire monter à bord le maximum de personnes !

Journée d'accompagnement collectif des PAT - 16 septembre 2021 à Loos-en-Gohelle

« Faire un PAT, c'est d'abord créer un climat de confiance »

« Le premier rôle de la collectivité est de créer le lieu propice à la rencontre, souligne en effet Thibault Fournier, consultant pour ExtraCité. Pour que les habitants mais aussi les territoires voisins puissent se connaître, se parler, échanger. Vient ensuite le temps de travailler ensemble, de monter un projet, bref de coopérer. »

Quant à la peur de ne pas être écouté ? « Être à l’écoute soi même est gage de réussite, répond Thibault Fournier. Il ne faut pas projeter ses attentes mais être à l’écoute, se laisser surprendre et rester en posture de curiosité. On ne peut pas décréter la coopération, mais on peut la faciliter. »

« Faire un PAT c'est aussi créer une ambiance, abonde dans le même sens Marie Décima, chargée de mission au Cerdd. Le territoire crée les conditions de rencontre, d’écoute, de dialogue entre les acteurs… c’est le moteur d’un PAT ! »

« La coopération est la prise en compte et la reconnaissance des contraintes des personnes rencontrées sur les territoires, souligne encore Alexis Montaigne, chargé de mission au Cerdd. Les objectifs peuvent être contradictoires mais on peut avancer ensemble. »

>>> À lire aussi : La coopération au cœur des projets d'alimentation durable

Impliquer les habitants du territoire

Avancer, mais aussi prendre son temps. C’est ce qu’a souligné Marie-Martine Poirot, directrice de la transition agricole et alimentaire à Douaisis Agglo, une collectivité pionnière en matière de PAT. Pour ce territoire, tout a commencé en 2007 (il y a près de 15 ans!), dans le cadre de la Trame verte et bleue. La démarche a été très progressive, et ponctuée de plusieurs étapes : charte circuits courts, programmes Alimcad, Agricad, Biocad…

Un des éléments clé dans ce processus : la mise en place d’une démarche de concertation. « L’objectif était d’apprendre à connaître les agriculteurs notamment, à travailler ensemble, souligne Marie-Martine Poirot. Il faut prendre son temps, réussir à fédérer… cette démarche de concertation nous a pris une bonne année ! Une année pour que chacun connaisse notre territoire et ait envie de travailler avec nous, un temps d'animation essentiel pour faire en sorte que les projets émanent d'eux. Huit mois à une année pour chaque approche nouvelle ou projet nouveau (santé et alimentation, participation citoyenne…). Par ailleurs, la diversité des actions a permis d’élargir le nombre de personnes touchées. »

L’idée de la démarche était aussi d’accepter de faire confiance : « Je suis là pour faire parler, mais pas pour mettre en avant ce que je pense : et là on se dit c’est fabuleux tout ce que les autres acteurs ont à nous apprendre ! »

Oser et essaimer pour que le PAT infuse le plus largement possible : ce n’est pas la vitesse de réalisation qui importe dans ce type de projet, c'est la dynamique de diffusion de cette ambiance de coopération pour une alimentation durable.

« Oser, tenter des expérimentations, insiste Marie-Martine Poirot. Nous avons organisé une opération de glanage, ça a peu intéressé. Nous tenterons autre chose !  Enfin, réaliser des PAT communaux nous a permis à la fois de toucher plus de bénéficiaires habitants et d'accompagner des élus locaux dans cette dynamique. »

… une aventure qui se poursuit

C’est finalement en 2017 que le projet alimentaire territorial de Douaisis Agglo est officiellement reconnu par le ministère de l’agriculture. En 2021, la collectivité obtient la reconnaissance officielle par la Draaf du niveau 2 du PAT, pour une durée de 5 ans.

Pour 2022, Douaisis Agglo a encore identifié plusieurs axes de travail : le bien-être des agriculteurs, favoriser l’émergence d’une structuration des filières territoriales, la mise en place d’une trame brune autour de la biodiversité des sols, la précarité alimentaire, une gouvernance et une évaluation du projet transversale et participative.

Et Marie-Martine Poirot de souligner à nouveau :  « Dans ce type de projet il faut partir sur du temps long, il faut prendre le temps car c’est un véritable cheminement qui implique des changements de pratique. »

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