Mis à jour le 28 juillet 2016

Rencontre avec Sylvain Tranoy, adjoint au maire d’Iwuy.

Analyse de l'initiative

La commune d’Iwuy ambitionne de créer le premier éco-quartier labellisé "démonstratif bas carbone" dans le département du Nord. La chaleur des logements proviendrait de la nappe phréatique.

C’est peut-être à Iwuy, petite commune rurale de 3 200 habitants à la porte du Cambrésis, qu’on verra pousser l’un des écoquartiers les plus innovants de notre époque. Le maire et son équipe projettent de consacrer trois hectares de friches à la construction de 120 logements basse consommation dont les besoins énergétiques seront couverts au moins à 50 % par les ressources renouvelables.

L’appel à projets régional

La commune a répondu à l’appel à projets lancé par la Région Nord-Pas de Calais et l’ADEME « Bâtiments et quartiers de qualité énergétique et environnementale ». Ce dernier est reconduit chaque année depuis 2007 pour soutenir les constructions et réhabilitations basse consommation de qualité environnementale ainsi que les projets d’écoquartiers. Il permettra à la ville d’Iwuy de financer 70 % des frais liés aux études d’ingénierie. Ainsi trois spécialistes - un paysagiste, un architecte urbaniste et un ingénieur en efficacité énergétique et en qualité environnementale - mènent une approche environnementale de l’urbanisme (AEU) sur plusieurs thèmes : les choix énergétiques et leur adaptation aux facteurs climatiques locaux, la gestion des déplacements, la gestion de l’eau, la gestion des déchets, l’environnement sonore, le paysage et la biodiversité et la prise en compte des sols. Les agences de paysage Noyon (Ardres), d’architecture et urbanisme Olivier Parent (Valenciennes) et le bureau d’études AZIMUT (Valenciennes) sont en charge de l’étude de conception.

Place aux grandes ambitions

Le projet de la commune répond en tous point aux critères du « quartier démonstratif bas carbone » de l’appel à projets régional. Pour y prétendre, il faut présenter un taux minimum de reconversion de friches (commerciales, industrielles, agricoles, etc.) de 30% sans étalement urbain. Une desserte doit être existante ou programmée à moins de cinq minutes d’un pôle d’échange ou d’un réseau de transport en commun. La densité moyenne du quartier est d’au minimum quarante logements par hectare. L’intégration des énergies renouvelables doit être forte : elle doit atteindre au minimum 50 % de la consommation du site ; consommation des bâtiments et consommation de l’éclairage public comprises. L’exemplarité s’exprime aussi en termes de mixité des fonctions, de circulations douces, de limitation de la place de la voiture, de nature en ville ou encore de gestion de l’eau.

« L’écoquartier le plus innovant possible »

L’écoquartier se situe au lieu-dit "Les Moulins", une ancienne enclave de quatre hectares entourée de zones urbanisées, qui se compose à 40 % de délaissés urbains et à 60 % de prairies de fauche. « Nous sommes dans la logique de l’économie des terres agricoles et de la densification des espaces en cœur urbain », explique l’adjoint au maire Sylvain Tranoy. Ce projet devrait permettre, à terme, la construction de 120 logements écologiques. Une première tranche de quarante logements, dont vingt-cinq adaptés aux besoins des seniors et des personnes à mobilité réduite, va démarrer en 2013. « Nous voulons créer un écoquartier bas carbone le plus innovant possible », précise Sylvain Tranoy. La commune veut, en effet, attirer de nouveaux ménages.

Une boucle d’eau tempérée à 12 degrés

Pour engager les opérateurs immobiliers dans ce projet hors du commun, la commune apporte la preuve des futures performances énergétiques au moyen d’une étude de faisabilité. Elle étudie en particulier la mise en place d’une production de chaleur collective à partir de la nappe d’eau souterraine. « Nous avons balayé toutes les autres sources d’énergie, y compris le zéro énergie », explique Jacques Pertriaux, ingénieur du bureau d’études Azimut. La ressource en bois est insuffisante localement pour couvrir les besoins. Dans cette région, l’eau chaude solaire ne peut être fournie suffisamment qu’une partie de l’année seulement. Il n’y a pas non plus de source de chaleur urbaine à proximité. D’autres solutions comme la géothermie et le photovoltaïque ont été écartées pour des raisons de coûts. Il reste par chance la potentialité de raccorder une pompe à chaleur à la nappe phréatique profonde de 20 à 30 mètres et d’une température constante de 12°C, été comme hiver. La boucle géothermale ainsi créée permettrait de chauffer les logements en hiver et de les rafraîchir en été et de couvrir 80 % à 100% des besoins en chauffage et en eau chaude sanitaire. Un forage exploratoire sera réalisé au premier semestre 2013. Une autre expérience de ce type, dans le cadre d’une opération de plus grande envergure, a été initiée par le bureau d’études Azimut à Valenciennes sur les Rives de l’Escaut.

Peu d’impacts environnementaux

Quel sont les risques liés au refroidissement de la nappe ? « Les impacts environnementaux seront très faibles, explique le spécialiste, car la quantité d’eau prélevée pour chauffer 150 logements est négligeable par rapport à la masse d’eau disponible ». L’eau prélevée en amont de la nappe avec un débit de 80 m3/heure serait réinjectée avec quelques degrés de moins à une distance minimale de 80 mètres en aval. Si besoin, le complément de chaleur sera apporté grâce à l’orientation bioclimatique des logements (apports solaires gratuits), et la récupération de la chaleur dite "fatale" (énergie perdue par le fonctionnement des équipements et produite par les occupants) par la ventilation double flux. « Notre travail est de produire la chaleur juste suffisante, de ne pas surdimensionner les équipements ni de prélever de la chaleur plus que nécessaire dans l’environnement », ajoute Jacques Pertriaux.

Faire accepter le logement mitoyen en secteur rural

Qui seront les futurs habitants de l’écoquartier ? Peut-être pas les gens de la commune à en croire l’adjoint au maire, qui explique que la population rurale reste très attachée au modèle de la maison individuelle. Les logements regroupés, au minimum par deux, dans un souci de compacité et de performance énergétique, ainsi que les logements sociaux qui font partie du concept d’écoquartier, attirent plus facilement les habitants des villes. La ville d’Iwuy doit donc continuer à soigner les atouts qui attireront futurs occupants et investisseurs immobiliers.

Fiche d’identité :

L’écoquartier d’Iwuy puisera-t-il sa chaleur à la source ?

  • Contact : Sylvain Tranoy, adjoint au maire au 03 27 37 90 31
  • Date de l’opération : mars 2012
  • Montant de l’opération : étude de faisabilité de 6 mois financée à hauteur de 38 700 €TTC.
  • Financement : Taux de prise en charge FRAMEE : 70%

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