Mis à jour le 13 décembre 2016

La Maison de l’Habitat Durable (MHD) de Lille se devait d’obéir aux critères de la qualité environnementale. Mais plutôt qu’un modèle impressionnant, la ville de Lille, maître d’ouvrage, a réalisé un équipement démonstrateur et accessible.

CONTEXTE et descriptif de l'action

Depuis octobre 2013, la Maison de l’Habitat Durable accueille le grand public lillois et de la métropole au coeur du quartier de Wazemmes. Les visiteurs y trouvent un "guichet unique" : des spécialistes de l’architecture et des techniques du bâtiment, du montage financier et du droit les orientent dans leurs projets de construction neuve ou de rénovation de leurs habitations (ces derniers dossiers sont largement majoritaires). Au cours de sa première année de fonctionnement, la maison a reçu plus de 2 000 demandes de conseils, qui ont conduit à 1 600 accompagnements personnalisés. L’équipement abrite également une exposition permanente des procédés et matériaux d’éco-rénovation et d’éco-construction (isolation thermique et acoustique, bardage, chauffage, récupération d’eau de pluie, approvisionnement en eau chaude "solaire", etc). Parmi les pièces les plus spectaculaires : trois "écorchés", des maquettes de maisons détaillant l’isolation d’une structure béton, d’une ossature bois et d’une structure en brique.

ANALYSE DE LA DÉMARCHE

L’inspiration de Danielle Poliautre

Voilà pour le contenu et un aperçu de l’activité, qui constituent un équipement et un service d’ampleurs assez uniques en France. Mais quid de l’écrin ? Cette Maison de l’Habitat Durable occupe un ancien bâtiment industriel, autrefois atelier d’application d’une école technique, livré aux pigeons pendant des décennies. C’était l’idée de Danielle Poliautre, élue lilloise attachée au quartier de Wazemmes et aux questions environnementales, malheureusement décédée avant que le projet n’émerge. En 2009, la ville de Lille a lancé une procédure de conception-réalisation. Au terme d’échanges approfondis avec plusieurs équipes, c’est un groupement conduit par l’entreprise générale Demathieu & Bard, avec les architectes de l’atelier 9.81 et les scénographes de l’atelier Smagghe, qui a été chargé de conduire la réhabilitation.

Voyager léger

Le parti adopté a été le respect. Les architectes le traduisent par l’expression "voyager léger" : peu d’interventions, peu de matières déplacées ou ajoutées. Ainsi les poteaux en fonte, les grandes poutres métalliques et la charpente en bois (recouverte de brou de noix) ont été conservés. Les formes hérissées des sheds de toiture- demeurent également, même s’ils ont été doublés à l’intérieur par des bacs aciers garnis de laine de roche, et s’ils ont été percés pour laisser entrer de la lumière. Un des sheds a été démonté pour ménager une terrasse, lieu de rendez-vous pédagogique. L’ajout le plus spectaculaire se trouve sur le pignon sud du bâtiment, donnant sur une cour fermée : les maîtres d’oeuvre y ont accolé une étroite serre, qui épouse l’ancien volume et fait office d’entrée publique. A l’intérieur de la Maison, une mezzanine a été construite qui supporte des bureaux et une salle de réunion. Au sol, tous les meubles, y compris les éléments de l’exposition, sont montés sur roulettes : au besoin, pour une circonstance particulière, un espace de plus de 500 m2 peut être dégagé. C’est aussi une réponse à une exigence du cahier des charges : l’équipement devait être modulable et même reconvertible le cas échéant.

Une qualité reproductible

L’autre condition du marché, outre les considérations de coût, était bien sûr la qualité environnementale et la performance énergétique du nouveau lieu. Dans une mesure raisonnable cependant. "Nous n’avons pas cherché à atteindre la haute performance pour toutes les cibles de la HQE, n’en déplaise à certains puristes, explique Francis Lambert (en photo), chargé du pilotage du projet à la mairie. Il nous a semblé plus intéressant de faire et de montrer ce qui était faisable, dans un lieu donné, avec des moyens donnés". Après tout, la transformation de cette halle, placée dans un tissu bâti dense, correspond aux contraintes que rencontrent la plupart des "propriétaires rénovateurs" de la métropole lilloise. Le chantier, qui a duré de juin 2012 à septembre 2013, s’est d’ailleurs voulu très ouvert ; plusieurs visites, à diverses étapes, ont été proposées aux personnes intéressées. Et des écoliers et des artistes ont été associés à certains aspects de la réalisation (conception d’une fresque, accrochage de nichoirs, de gîtes à insectes et de plantes).

Eco-produits de proximité

Les murs de brique de l’ancienne halle sont isolés par l’intérieur. L’isolant utilisé en couches de 12 cm d’épaisseur est le métisse, issu du recyclage de vêtements, produit dans l’entreprise le Relais (réseau Emmaüs) à Billy-Berclau dans le Pas-de-Calais. Les peintures éco-labellisées (gamme NéRée) proviennent d’une entreprise du même réseau : elles sont fabriquées à partir de boues de lavage des carrières du Boulonnais. Des panneaux solaires thermiques fournissent de l’eau chaude. L’eau de pluie est récupérée et sert à l’arrosage des plantations et au fonctionnement des sanitaires. La serre de l’entrée, équipée à son sommet d’ouvrants gérés par informatique, a une fonction bioclimatique de régulation de la température intérieure. Des aménagements accessibles à des particuliers qui voudraient rénover leur propre bien, fût-il dégradé...

La performance au rendez-vous

"Sur quelques points néanmoins, nous avons opté pour des solutions qui ne sont pas forcément à la portée de tous, poursuit Francis Lambert. Exemple : le chauffage par le plancher alimenté par une pompe à chaleur branchée sur la nappe phréatique. Mais cela sert de démonstration pour des bâtiments publics. Idem pour la ventilation double flux, dont nous soulignons l’importance, associée à l’isolation". Dans d’autres cas, la dépense a été jugée trop lourde à supporter : le maître d’ouvrage, par exemple, a renoncé à la pose de plaques en fermacell sur les parois intérieures de la Maison. Compte tenu de ces audaces et de ces compromis, la performance du bâtiment, après une année de fonctionnement, s’avère satisfaisante : 82,3 kWhep/m2/an, résultat conforme au cahier des charges (BBC rénovation), à confirmer au fur et à mesure de l’exploitation. Un petit défaut, relevé par Francis Lambert : un niveau de lumière naturelle un peu faible, nécessitant l’utilisation assez courante de l’éclairage électrique.

Passerelle vers les professionnels

L’un des grands mérites de l’opération a été de ramener de la vie dans l’ancien bâtiment et de rendre de l’attractivité à son environnement immédiat. Les premiers chiffres de fréquentation de la Maison de l’Habitat Durable de Lille Métropole, on l’a dit, sont encourageants. L’équipe d’animation mutiplie les initiatives : conférences, expositions temporaires, ateliers (dont un, régulier et très couru, sur l’auto-réhabilitation). L’établissement veut aussi affimer son rôle de relais entre le public et le monde du BTP. En plus de sessions d’information ou de formation, très utiles aux entreprises, elle envisage la création d’un portail qui mettrait en relation des particuliers, demandeurs de travaux et à la recherche de prestataires, avec des professionnels référencés.

Ce qu'il faut retenir

La Maison de l'Habitat Durable préfigure un guichet unique pour toute la métropole, pour le particulier face à un projet de réhabilitation de son habitat ainsi qu’un lieu d’exposition et d’animation sur l’habitat durable. Cet équipement accompagne l’innovation et la réalisation de projets “vitrines” en matière de réhabilitation de qualité énergétique et environnementale.

FICHE D'IDENTITÉ

Lieu/échelle d'intervention

Ville de Lille

Identification du porteur de projet

Partenaires

Partenaires : ADEME et Conseil régional Nord-Pas de Calais

Indicateurs de moyens et de résultats

Indicateurs :

  • Indicateur de performance du bâtiment  : 82,3 kWhep/m2/an
  • Choix techniques de réhabilitation  :
    • isolation du bâti avec l’usage d’éco-matériaux et durabilité des matériaux mis en oeuvre
    • ventilation double flux
    • récupération de chaleur via une serre bioclimatique et une pompe à chaleur sur nappe
    • préchauffage de l’eau sanitaire avec des panneaux solaires
    • recours à des peintures éco-labellisées
    • recours aux énergies renouvelables
    • Une étude de bilan carbone a été initiée sur le projet de la MHD afin d’en évaluer l’impact carbone. Les résultats montrent que 74% d’émissions de CO2 ont pu être évitées sur le processus de « mise à disposition du bâti » par rapport à la même opération conduite en destruction/reconstruction et avec des matériaux traditionnels.
  • Coût de rénovation et aménagement intérieur : 4,2 M€, dont 3,06 M€ pour les travaux.
  • Financement FRAMEE : 247 912 €

Période de réalisation

  • Durée de l’opération : 18 mois
  • Année de lancement de l’opération : 2012
  • Date d’ouverture de la MHD au public : septembre 2013

Bénéficiaires / cibles de l'action

Habitants, acteurs du territoire

   

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