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Mis à jour le 8 mars 2023

Comment mobiliser autour des transitions ? Comment passer à l’action au sein d’une collectivité ? C’est ce qu’a fait la Communauté de Communes du Val d’Ille-Aubigné, en Bretagne. Son expérience nous montre que la mise en récits est un outil efficace pour rassembler et faire naître l’engagement autour d’un objectif commun.

Mardi 11 janvier 2022, la communauté apprenante nationale sur la Mise en Récit(s) des projets de transition, portée par la Fabrique des Transitions et le Cerdd, s’est réunie en visio autour l’approche narrative comme moyen de mise en mouvement. L’occasion pour Elaine Briand, animatrice des transitions au sein de la Communauté de Commune du Val d’Ille-Aubigné (CCVIA) de faire un retour d’expérience sur la démarche entreprise au sein de ce territoire depuis l’été 2020, et de partager les clés de réussites et les obstacles rencontrés.

La Communauté de Communes du Val d’Ille-Aubigné est un territoire rural et périurbain d’Ille-et-Vilaine en Bretagne, qui a placé la transition vers un modèle plus durable au cœur de son projet de territoire, depuis sa création en 2017. En 2019, la CCVIA décide d’aller plus loin : elle répond à l’appel à projet « mobilisation et participation des citoyen·nes dans les transitions écologiques et énergétiques », lancé par l’ADEME et la région Bretagne. Le but ? Développer en interne une ingénierie, une animation et des outils pour renforcer la mobilisation pour la transition écologique sur le territoire. Le narratif est alors ciblé comme un outil à mettre en place : c’est la naissance de la démarche de mise en récits de la CCVIA, qui sera animée par Elaine Briand.

Labo Mise en récits : 3 questions à Elaine Briand, Communauté de commune du Val d’Ille-Aubigné

Durée: 04:32

Le pas de côté

À sa première réunion, la quinzaine de membres du groupe projet (six élu·es et des agent·es travaillant sur un large panel de thématiques), envisage l’exercice comme du simple storytelling : écrire un récit unique, retraçant le chemin parcouru et fixant l’orientation à suivre. Or, la mise en récits n’est pas que cela ! Après une introduction aux principes de la mise en récits, les membres du groupe font évoluer leur positionnement et effectuent un pas de côté nécessaire.

« Ils ont compris que la mise en récits était avant tout une posture, conduisant à un processus de long terme, progressif et itératif, souligne Elaine Briand.Ils sont même allés plus loin dans cette évolution, puisqu’ils se sont engagés à l’appliquer sur toute la durée du mandat, et pas uniquement sur celle de l’appel à projet ! »

Ces premières discussions établissent aussi l’ambition du groupe : utiliser la mise en récits pour rassembler et mettre en mouvement les acteurs du territoires, en garantissant l’appropriation des enjeux de la transition par tous : élu·es, agent·es de tous les services, citoyen·nes... Pour cela, c’est l’approche par la communication et l’implication qui est privilégiée, avec la volonté d’incarner pour mieux informer sur les projets de la collectivité.

Les bases de la démarche sont posées ! Reste à se lancer dans du « concret » pour mieux saisir la portée de cette approche, grâce à la réalisation de trois livrables : une fête, une carte et une frise.

Faire corps autour d’une action commune : l’organisation de la fête du vélo

En juin 2021, la CCVIA organise sa première fête du vélo, un évènement phare du projet de mise en récits du territoire. En mettant en lumière la progression de l’utilisation du vélo sur un territoire historiquement dominé par la voiture individuelle, cette fête offre une représentation visible du changement de modèle opéré grâce au projet de transition territoriale. Mais son organisation est également l’occasion de faire coopérer les équipes de manière transversale. En effet, tous les services mettent la main à la pâte pour organiser cette journée, et faire de la fête du vélo un moment qui dépasse la seule question de la mobilité. Par exemple, le service nature propose des balades guidées « vélos et nature » pour aller à la découverte de la biodiversité locale !

CCVIA- Affiche Breizh Bocage_©CCVIA

Cette initiative, conduite dans une posture transversale, systémique et mobilisatrice, crée un sentiment positif au sein des équipes, grâce à la reconnaissance des actions de chacun en faveur du projet communautaire. Elle permet aussi de redonner corps et sens au changement de modèle porté par le projet de transition territorial.

Visualiser le chemin parcouru : les 10 ans de Breizh Bocage

2021 marque également les 10 ans de Breizh Bocage, un programme phare pour la CCVIA. À cette occasion, la CCVIA souhaite revenir sur l’évolution de son action bocagère. Une frise chronologique illustrée retraçant les grandes étapes du programme est conçue, imprimée sur une bâche XXL et exposée. Le succès est au rendez-vous ! Outil visuel de communication à la fois ludique et pédagogique, elle permet au plus grand nombre de visualiser le chemin parcouru par la collectivité en matière de sauvegarde du bocage.

« L’engouement est tel que la frise s’apprête à connaître une seconde vie comme support d’éducation au développement durable pour les communes et les acteurs de l’éducation au développement durable », précise Elaine Briand. Une preuve supplémentaire de la capacité d’essaimage de la mise en récits !

Prendre conscience du foisonnement d’initiatives déjà en place : la cartographie des initiatives

CCVIA - Carte illustrée des initiatives_ ©CCVIA

Afin de mieux connaître les initiatives déjà engagées sur le territoire, élu·s et agent·s ont aussi souhaité constituer une cartographie des acteurs des transitions. Après un gros travail de recensement mené dès le début de la démarche de mise en récit, 250 initiatives sont identifiées. En attendant une carte numérique exhaustive, une sélection est opérée pour placer une soixantaine d’entre elles sur une carte illustrée du territoire. Ce travail montre deux plus-values majeures. D'abord une émulation palpable et un engagement fort parmi des élu·es séduit·es par l’exercice, qui leur permet de reconnaître la diversité des initiatives sur leur territoire. Mais aussi un enthousiasme pour ce support illustré joyeux et communicatif, qui participe au renfort du dialogue entre élu·es municipaux·ales et élu·es de la communauté de communes.

Savoir s’adapter

La mise en récit est un processus évolutif, qui doit savoir saisir les nouvelles opportunités, mais aussi s’adapter aux contraintes. Pour la CCVIA, ces contraintes sont administratives : financée par l’ADEME et la Région dans le cadre d’un appel à projet, la CCVIA a l’obligation de remplir des objectifs réguliers et des indicateurs précis. Cette contrainte de « résultats » entre parfois en contradiction avec le long terme et la progression que requiert la mise en récits. Il faut donc savoir jongler entre ces impératifs, et transformer autant que possible les contraintes en opportunités : un rôle assuré en premier lieu par l’agent chargé de la mise en récits.

En l’occurrence, Elaine a converti cette obligation de livrables en une opportunité pour mettre en place rapidement des projets concrets, qui ont permis d’incarner la démarche et de voir (littéralement) les effets de cet engagement.

Mettre en récits pour rassembler : un pari gagnant

Rassembler élu·es et agent·es, établir un horizon commun, faire collaborer les différents services, retracer l’histoire des actions menées sur le territoire, organiser des fêtes, constituer des frises ou des cartes… La mise en récits peut prendre différentes formes, elle est variée et évolutive. C'est une méthode efficace pour faire naître de l’engagement autour d’un projet de transition. L’exemple de la CCVIA en est la preuve !

L’approche narrative est complexe : trop d’ambition dès le début risquerait de décourager les équipes ! Il est plus sage de démarrer avec un objectif modeste ciblant une seule fonction, et de viser une progression par petit pas. Au fil du temps, d'autres fonctions de la mise en récits se présenteront : communication auprès des habitants, outil d’évaluation… Une prochaine étape pour le Val d’Ille-Aubigné ?

>>> À lire aussi : un autre regard sur la mise en récit dans la Communauté de Communes du Val d’Ille-Aubigné, par des étudiants en journalisme à l'Institut de Journalisme Tous Médias (IJTM) dans le cadre d’un groupe accompagné par Territoires-audacieux.fr

Ce qu’il faut retenir

  • Rassembler et clarifier : voici les deux mots d’ordre du lancement d’une démarche narrative. En effet, pour être fructueuse, la mise en récits doit être nourrie par une diversité d’expériences et de points de vue.
  • Diversifier les supports et soyez créatifs ! La mise en récits n’est pas seulement un exercice rédactionnel : n’ayez pas peur d’explorer différents supports suivant vos objectifs.
  • La mise en récit contribue à faire naître de l’engagement grâce à deux effets majeurs : susciter un sentiment positif de reconnaissance, et construire du sens ! Le récit permet de rappeler le changement de modèle poursuivi globalement par le projet de territoire, et de souligner l’importance de chacune des actions dans l’atteinte de celui-ci, remobilisant ainsi les équipes.
  • L’agent chargé de porter la mise en récit a une posture clé construite autour de « l’ingénierie de la relation ». En effet, animer une démarche narrative fait appel à des compétences bien spécifiques, parfois nouvelles dans les collectivités, et centrées autour des savoirs-êtres : coopération, réflexivité, écoute et attention aux autres, posture d’appui, etc.

>>> Retrouvez  la publication du Cerdd sur la Mise en récits

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