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Mis à jour le 17 novembre 2016

Depuis qu'elle a tourné la page de ses industries anciennes, la Métropole européenne de Lille (MEL) a redécouvert sa face agricole. Elle a évolué ensuite vers la thématique alimentaire, à travers un contrat avec la Région et l'accompagnement d'initiatives de terrain. En juin 2016, après concertation avec les habitants du territoire, elle a adopté une stratégie agricole et alimentaire qui la confirme dans un rôle d'assemblière.

La MEL est la plus agricole des grandes agglomérations françaises : 44 % de son sol, soit 27 000 hectares, sont occupés par des champs et des pâtures, représentant 774 exploitations (recensement agricole 2010). Durant les Trente Glorieuses, ces terres fertiles ont été considérées comme des réserves de développement économique et urbain. Une part a ainsi disparu mais de vigoureuses réactions de la profession ont permis de préserver l'essentiel.

Depuis 2010, un comité partenarial, instance de dialogue composée d’élus et techniciens de la chambre d'agriculture et de la Métropole Européenne de Lille, se réunit deux fois par an pour échanger sur des projets ou des sujets pouvant impacter l’activité agricole. Et surtout, l'agriculture locale est reconnue à sa juste valeur : comme une activité économique pourvoyeuse d'emplois (6,6 pour 100 hectares contre 2,8 en moyenne dans le Nord - Pas de Calais), une garantie d'équilibre paysager et une composante du bien-être collectif.

Paysage ©MEL

© MEL

Une démarche partenariale pour une alimentation locale et bio

Depuis une dizaine d'années, bien que ce ne soit pas officiellement de sa compétence, la MEL a engagé des actions de soutien et de qualification de l'activité agricole. C'est ainsi qu'est né le projet de zone maraîchère et horticole de Wavrin (zmw), sur une cinquantaine d'hectares acquis par l'établissement public de coopération intercommunale. Après une longue phase d'étude, il a été décidé de la construction d’un hangar agricole d'exploitation mutualisé. La zmw ouvrira à l’automne 2016. Six maraîchers bio ont signé une convention avec la MEL pour exploiter le foncier. D’autres parcelles restent vacantes : deux dès à présent (3 ha et 4 ha) et quatre autres qui peuvent se libérer. Un espace test et une unité de transformation sont aussi à l’étude. Cette opération bénéficie d'une contribution financière de la région dans le cadre de CAAP'Agglo (voir ci-dessous) et de l'Agence de l'Eau Artois Picardie, en lien avec la protection des zones de captage d'eau. Dans le même esprit, un gros travail a été accompli par les services de la MEL, depuis 2010, pour favoriser l'approvisionnement local dans la restauration collective scolaire en produits locaux et biologiques locaux. Un diagnostic a été établi par le centre de ressources A Pro Bio.

Un travail partenarial avec la chambre d'agriculture et le Gabnor a permis de pointer les besoins de structuration de l'offre. Il a aussi débouché sur des propositions de sensibilisation des convives à de nouvelles habitudes alimentaires, d'outillage des collectivités (des guides méthodologiques à destination des communes ont été rédigés) et de formations de professionnels de la cuisine. Concernant l’approvisionnement local, la MEL va poursuivre son accompagnement aux communes de son territoire. L’action portera non seulement sur la demande mais aussi la structuration de l’offre en partenariat avec la Région, dans le cadre de l’approvisionnement en produits locaux des lycées et le Département pour les collèges, les établissements d'accueil de personnes âgées dépendantes (Ehpad), les centres pour personnes handicapées et pour la protection de la jeunesse. L’ensemble des acteurs économiques du territoire seront associés (coopératives, MIN de Lomme…).

Un contrat CAAP, puis une stratégie métropolitaine

En 2013 la signature avec la Région Nord - Pas de Calais d’un "Contrat d'Agriculture et d'Alimentation Périurbaines d'Agglomération" (CAAP'Agglo) témoigne de l’intérêt porté par la MEL aux questions alimentaires et sa volonté d’en être actrice. La dynamique régionale et son aide financière (150K€/an pendant trois ans) l’ont aidée à décliner des actions pour préserver la ressource foncière, promouvoir des filières alimentaires de proximité, encourager des pratiques respectueuses de l'environnement et valoriser l'espace rural.
Aujourd’hui, la MEL a décidé « d’aller plus loin » en s’engageant dans un Projet Alimentaire Territorial pour permettre notamment la relocalisation de la consommation alimentaire, la structuration de l’offre de produits locaux et le renforcement du lien entre ville et campagne. Des premiers pas confortés aujourd'hui par l'évolution des mentalités, dont témoigne, par exemple, l'engouement pour les potagers partagés ou les fermes urbaines...

En 2015, sous l’impulsion de Bernard Delaby, maire d'Haubourdin, vice-président chargé de l'espace rural, de l'économie agricole et du secteur agroalimentaire, une "mission agriculture", forte de trois techniciennes, a vu le jour. La mission est rattachée au pôle développement territorial et social. Elle s’est constituée au sein de la MEL "pour mieux identifier et coordonner les actions en ce domaine", indique Isabelle Ciekanski, l'une des chargées de mission. Sa première action structurante a été de s’atteler à l’écriture partagée d'une "stratégie agricole et alimentaire", débattue et adoptée par le conseil de la MEL le 24 juin 2016.

Vente Directe

© MEL

ZOOM sur la stratégie agricole et alimentaire métropolitaine

Enjeu 1. Conforter l’agriculture comme filière économique métropolitaine

  • Conforter les filières agricoles et agroalimentaires existantes
  • Assurer le renouvellement des exploitations et installer une nouvelle génération d’exploitants
  • Inciter au développement de filières innovantes d’excellence et d’avenir

Enjeu 2. Mettre en place un observatoire de l’agriculture et préserver le foncier agricole

  • Mettre en œuvre le projet agricole métropolitain par la protection et la valorisation durable du foncier agricole
  • Renforcer la connaissance de l’espace rural et de l’activité agricole
  • Construire une approche collective intégrant l’agriculture en amont des projets d’aménagement

Enjeu 3. Inciter, accompagner et valoriser les pratiques agricoles durables

  • Développer des pratiques agricoles répondant aux enjeux environnementaux et agroécologiques
  • Favoriser le développement de l’agriculture biologique locale
  • Faire de l’agriculture métropolitaine un atout en matière d’adaptation du territoire au changement climatique et de continuité écologique (Trame verte et bleue)

Enjeu 4. Favoriser la relocalisation de la consommation alimentaire et structurer l’offre de produits locaux

  • Inscrire la métropole dans un projet alimentaire territorial (PAT)
  • Dynamiser l'approvisionnement local par la structuration des débouchés en circuits de proximité
  • Permettre aux habitants d’être acteurs de leur alimentation et de leur santé

Enjeu 5. Rapprocher l’urbain et le rural (agriculture urbaine, agri-tourisme et loisirs)

  • Valoriser l’agriculture de la MEL par la promotion de son rôle dans l’aménagement du territoire
  • Améliorer le vivre ensemble en favorisant les échanges entre la ville et la campagne
  • Favoriser la diversification des activités des exploitants en lien avec les besoins en matière d’éducation, de loisirs et de tourisme

Maraîchage

© MEL

Des orientations régulièrement soumises au grand public

La délibération-cadre "stratégie agricole et alimentaire" qui vient d’être adoptée par les élus métropolitains s’est co-construite avec les partenaires institutionnels, la profession et les organisations syndicales agricoles, et a fait l’objet d’une large concertation citoyenne.

L’objectif de la Métropole Européenne de Lille était clair : "Faire émerger une stratégie agricole et alimentaire partagée du monde agricole et au plus près des habitants et des élus de la métropole".

La concertation grand public (Fab Mel) est une nouvelle pratique citoyenne mise en place depuis l’été 2015 pour associer les habitants aux sujets qui les concernent directement. En l'espèce, plus de 400 avis de particuliers, cultivateurs, éleveurs et représentants d'organismes ont été collectés par le biais d'internet. Il en est ressorti quelques expressions fortes sur la :

- préservation du foncier,

- l'aide à la transmission des exploitations,

- le développement de l'agriculture biologique,

- le nécessaire encouragement de la consommation locale.

La consultation représente une ouverture : les contributeurs viennent d'une cinquantaine de communes, dont certaines situées hors du territoire. Elle confirme des acquis, comme le fait que la métropole est reconnue garante de la protection des terres agricoles. Elle permet aussi de mesurer des différences de points de vue : certains estiment que la priorité doit être donnée à la filière bio quand d'autres prônent le soutien de tous les systèmes de production. Autre exemple : les particuliers, dans leur ensemble, disent leur intérêt pour de petites fermes quand des professionnels soulignent la nécessité de grandes exploitations... D’autres rencontres seront organisées au cours du mandat pour poursuivre l’échange avec les habitants citoyens et rapporter les actions menées.

Zone maraîchère de Wavrin

© MEL

Un "EuraMINalimentaire" en construction

Et bien sûr, la nouvelle stratégie métropolitaine se nourrit des initiatives prises par les acteurs du secteur, qu'il s'agisse d'autres collectivités comme la Région, le Département et les communes, de la Chambre d'agriculture, du mouvement associatif (Gabnor, AMAP, Terre de liens, réseau Terres en ville, etc.), des systèmes de vente groupée, directe et courte. "Ce n'est pas un processus top/down, du haut vers le bas, explique Isabelle Ciekanski. Ce sont des actions qui s'agrègent, un système en construction". Une démarche particulièrement ambitieuse, accompagnée par la MEL, est à l’initiative du Marché d'intérêt national de Lomme, sous le vocable "EuraMINalimentaire". Plusieurs structures des différents secteurs de l'alimentation ont été réunies pour échanger sur ce que pourrait être et apporter un pôle alimentaire dans la métropole. Le projet reste en construction mais des objectifs sont définis. Ainsi le MIN propose déjà des solutions opérationnelles pour une alimentation locale durable et souhaite qu’EuraMINalimentaire devienne un site d’excellence.

ZOOM sur EuraMINalimentaire

La MEL et le MIN sont partenaires, pour créer un site d'excellence alimentaire. La délibération de lancement a été prise au conseil métropolitain d’avril 2016.

Trois axes structurent le projet EuraMINalimentaire :

Axe 1. Faire du MIN un hub logistique : renforcement du branchement sur le rail, mise en service d'un centre multimodal de distribution urbaine (qui mutualise les livraisons vers les commerces alimentaires du coeur de Lille).

Axe 2. Développement d'une "fabrique alimentaire" autour des trois objectifs suivants :

  • devenir un lieu d’animation, d’échange, d’expertise, d’expérimentation, de formation pour le réseau des acteurs de l’alimentation ;
  • développer les circuits alimentaires locaux, valoriser les produits agricoles locaux par la diversification des modes de commercialisation ;
  • anticiper et modéliser les attentes des consommateurs pour de nouveaux produits et les transformer en actes d’achat, assurer leur commercialisation.

Axe 3. Concourir à la qualité, la sécurité et la traçabilité alimentaires. Un partenariat fort existe avec les laboratoires et la recherche académique. Il s’agit de conforter les liens avec NSL, l’institut Charles Violette, le pôle légumes…

Une gouvernance affirmée et un projet alimentaire territorial en construction

Ainsi se dessine le profil d'une MEL "Ensemblière", et apparaissent les premiers traits d'un "système alimentaire durable". Des avancées restent à poursuivre. Par exemple, il faut faire entrer dans la boucle la grande distribution et les sociétés de restauration collective, qui suivent toujours "leur propre chemin". Sur le fond, les questions relatives à la santé n’ont pas été prises en compte jusqu'ici. Enfin, une gouvernance adaptée doit être inventée : quelle "instance de débat et de concertation" ? Dans sa délibération stratégique la MEL annonce cette gouvernance partagée en construction. Une étape importante de consolidation des acquis et de projection collective s’engage avec la construction du Projet Alimentaire Territorial. Ces plans d'action multi-acteurs sont encouragés par l'Etat et de nombreux territoires français s’engagent...

Ce qu'il faut retenir de cette démarche

  • L'intention première de la MEL est le maintien de son activité économique agricole par un écoulement des produits à l'échelle locale.
  • La prise en compte de la question alimentaire par le territoire s'effectue progressivement, à travers une réflexion partenariale sur la restauration collective, la signature d'un contrat CAAP'Agglo avec la Région, l'adoption d'une stratégie agricole et alimentaire, ou encore la construction du site d'excellence EuraMinalimentaire.
  • La spécificité de la démarche de la MEL est d'animer plusieurs projets de nature différente, qui touchent plusieurs secteurs de l'alimentation : la zone maraîchère, l’approvisionnement local, la logistique, le grand public.
  • La MEL assemblière mobilise des secteurs et des publics divers pour des initiatives opérationnelles.
  • D'autres secteurs pourront par la suite être explorés : celui de la santé et celui de la grande distribution, laquelle n'est pas encore partie prenante du processus.

Chiffres-clés (recensement agricole de 2010)

  • 44 % du territoire en surface agricole
  • 27 000 hectares consacrés à la culture et à l'élevage
  • 774 exploitations (9 par commune en moyenne)
  • 1,2 million d'habitants

Métropole européenne de Lille

  • Sous contrat avec la région CAAP'Agglo jusque fin 2016
  • Dotée d'une stratégie agricole et alimentaire depuis juin 2016.

Contact

Mission agriculture - agriculture@lillemetropole.fr

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Picto Document

Initiative Systeme Alimentaire - MEL - Cerdd

Format : PDF Poids : 213,86 ko

Auteur : Bertrand Verfaillie, journaliste indépendant, pour le Cerdd.

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