Mis à jour le 18 février 2021

La résilience s’est rapidement diffusée comme un concept phare de l’action publique. Avec la crise de la Covid-19, elle est même devenue impérative : « Il faut être résilient ! ». Mais comment faire pour un territoire ? De plus en plus de collectivités s’en emparent pour élaborer leur stratégie alimentaire, de santé ou d’aménagement... Zoom sur ce concept, ses enjeux et ses applications concrètes dans les territoires !

Résilience jeremy bishop unsplash
jeremy bishop © unsplash

Qu’est-ce que la résilience ?

D’abord utilisé pour qualifier la résistance d’un matériau à un choc, le concept de résilience a été médiatisé en France par le psychologue Boris Cyrulnik dans les années 1990. Depuis, la résilience s’est rapidement diffusée comme un concept phare de l’action publique.

Des deuils, des ruptures, des évènements traumatisants… On en vit tous, ils nous affectent, parfois nous déstabilisent, souvent nous poussent à se reconstruire. Il en va de ces épreuves individuelles comme des territoires : ces perturbations peuvent être des catastrophes naturelles (sécheresse, feu, inondation, canicule, pollution), des crises économiques (revirement industriel d’un territoire, fermeture massive d’entreprises), des risques technologiques (nucléaire, chimique…), mais aussi des phénomènes plus lents, comme le changement climatique.

Un territoire est alors dit "résilient" lorsqu’il est capable d’anticiper, réagir, s’adapter à ces perturbations, qu’elles soient lentes ou brutales. Le territoire est en capacité "de rebondir grâce à l’apprentissage, l’adaptation et l’innovation, d’évoluer vers un nouvel état en « équilibre dynamique » préservant ses fonctionnalités" (cf Thema "La résilience des territoires aux catastrophes"). Comme le roseau qui se plie mais jamais ne se rompt !

Boussole de la résilience - Cerema
Boussole de la résilience - Cerema

Pourquoi la résilience ?

Exposition aux risques - HDF
Source : Observatoire Climat Hauts-de-France © Cerdd

Les territoires sont de plus en plus vulnérables : 2 communes sur 3 en France sont aujourd’hui concernées au moins par un risque naturel, et le coût des catastrophes a été multiplié par 5 en 15 ans (cf Cerema "Territoires résilients, 6 leviers d’actions pour bâtir votre stratégie").

Nous vivons dans un contexte de crises systémiques et d’incertitude : avec le dérèglement climatique, la raréfaction des ressources, l’extinction de la biodiversité, la pollution, la mondialisation ou encore les crises économiques, les territoires sont amenés à subir de nombreux dérèglements au cours des années à venir :

"La résilience territoriale s’impose alors comme le moyen de dépasser les situations de crise et d’engager les territoires dans une vision à plus long terme qui intègre le risque et s’appuie sur les forces et les potentialités locales" rappellent Jean-Michel Tanguy et Anne Charreyron-Perchet (cf Cairn "La résilience territoriale : un premier diagnostic").

Les grands principes de la résilience territoriale

  • Connaître les risques et les vulnérabilités de son territoire.
  • Prendre en compte le territoire dans toutes ses dimensions - économiques, sociales et environnementales - à travers une démarche intégrée, au delà d’une approche sectorielle.
  • S’appuyer sur les forces locales, les structures et les acteurs existants.
  • La résilience ne se réduit pas à l’autonomie mais s’appuie sur des alliances notamment entre les territoires urbains et ruraux, entre tous les acteurs du territoire et les habitant·es.
  • Chaque élément du système territorial doit pouvoir remplir plusieurs fonctions.
  • Une politique territoriale sur le long terme plutôt que de réagir dans l’urgence une fois la crise survenue.
  • Intégrer les citoyen·nes : d’une vision pessimiste, d’une “déprise” du territoire à l’engagement, la participation, et la formulation d’un récit commun. La résilience ne peut se penser ni se faire sans la participation de tous·tes.
  • Travailler sur la mémoire des traumatismes et la mémoire collective, qui permettent aussi de comprendre la spécificité d’un territoire.

Néanmoins, la résilience peut être difficile à opérationnaliser. La résilience d’un territoire ne conduit pas forcément à la résilience des individus et inversement. De la même manière, il faut être vigilant·e à ne pas transférer sur les individu·es les plus vulnérables les coûts de la résilience et de la gestion des menaces, comme le rappelle Magali Reghezza-Zitt.

résilience - CISCA
© Cerdd

Quelques exemples de stratégies de résilience territoriale

  • Carcassonne : A la suite d'inondations meurtrières, la ville a décidé de s'engager dans une démarche de résilience en souscrivant un contrat de transition écologique avec l’État pour reconstruire le territoire dans une perspective de durabilité, via la concertation notamment.
  • Paris : La ville de Paris s’est engagée depuis 2015 dans l’élaboration d’une stratégie de résilience territoriale inédite, s’appuyant sur 35 actions autour de 3 piliers : la participation active des habitant·es, l’adaptation de l’aménagement urbain et la refonte des modes d’organisation. Plus de 2 500 cadres de la collectivités ont été formé·es, et la ville a défini les grands axes de sa stratégie autour des risques qu’elle a identifiés : les inégalités économiques, sociales et territoriales, le risque terroriste, le dérèglement climatique, la pollution de l’air, les risques liés à la Seine et la gouvernance territoriale.
  • Le Grand Angoulême : En s’appuyant sur son Projet Agricole et Alimentaire Territorial Durable, le Grand Angoulême souhaite relocaliser son système alimentaire (production, transformation, distribution…) pour "assurer une alimentation soutenable, saine et accessible à tous malgré les bouleversements à venir". Un "espace-test agricole" a été déployé pour permettre aux porteur·euses de projets agricoles d’expérimenter. L’agglomération anime également le réseau "Bien manger à l’école" pour sensibiliser les plus jeunes au "fait maison" et au gaspillage alimentaire. Accompagné par l'association Les Greniers d’Abondance, le projet de résilience alimentaire locale est également pensé en coordination avec les 38 communes de l’agglomération.
  • La Gironde : Le conseil départemental de la Gironde a initié sa stratégie résilience territoriale en 2019, fondée sur la co-construction avec les acteurs locaux et les citoyen·nes. Des axes de réflexion ont été définis comme prioritaires : l'agriculture, la santé, l'alimentation, l'éducation, l'éco-psychologie, les changements de comportements, le logement et le transport. La Gironde a orienté des actions résilientes réalisables dès 2020 et à l’horizon 2030 autour des enjeux de stratégies de développement du territoire, de la préservation de l’environnement, de la jeunesse, de l’habitat, de la culture, de l’insertion ou encore du financement. En 2020, la création d’un kit de résilience territoriale à destinations des collectivités a été lancé ; en 2030, 100% des aides aux communes seront soumises à des critères de résilience. Le département de la Gironde a aussi mis en ligne une "boite à outils résilience" comprenant :
    • un guide pratique pour entrer en résilience pour les communes et leurs regroupements,
    • un questionnaire en ligne pour tester la résilience des projets,
    • un MOOC dédié sur la "résilience territoriale : un récit transformateur ?",
    • Les 33 «  et si » : 33 questions de résilience territoriale qui s’appuient sur les 17 Objectifs de Développement Durable.

33 questions de résilience territoriale - Gironde
33 questions de résilience territoriale - Gironde

DES RESSOURCES POUR ALLER PLUS LOIN

Ressources Cerdd

Quelques livres 

  • Petit traité de Résilience locale, Agnès Sinaï, Raphaël Stevens, Hugo Carton, Pablo Servigne, Éditions Charles Léopold Mayer (2015)
  • Résiliences urbaines : les villes face aux catastrophes, Géraldine Djament-Tran et Magali Reghezza-Zitt (dir.), Editions Le Manuscrit (2012)

Identification

  • Auteur :

    CERDD

  • Date de publication :

    Janvier 2021

  • Taille du document :

    Web

  • Échelle géographique :

    Nationale

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