Mis à jour le 23 mars 2021

Les Hauts-de-France sont la région la moins boisée de France ? Parfait, ce sera alors le terrain d’expérimentation qu’investissent trois passionnés d’agroforesterie pour planter arbres et haies sur des parcelles agricoles, à la demande d’agriculteurs et en faire de véritables solutions pour le climat. L’association des Planteurs Volontaires naît de cette volonté, en 2013.

Description de l’action

Soupirs devant les mornes et vastes plaines du paysage agricole, véritables déserts écologiques. Tension devant des pratiques intensives qui « accélèrent l’érosion, affaiblissent la biodiversité et transforment la terre en sols squelettiques agricoles ». Doléances des agriculteurs qui sont les premiers à en souffrir. « Les agriculteurs sont coincés entre deux feux : d’un côté on leur demande de produire de la richesse vivrière pour tous, de l’autre, les méthodes qu’ils emploient détériorent leur propre outil de travail : le sol ! souligne Alan Guillou. A travers l’action des Planteurs Volontaires, nous cherchons à démontrer que l’arbre peut être un merveilleux outil à leurs côtés et le pilier fondateur d’une nouvelle façon de cultiver la terre qui rend compatible rentabilité économique et écologie. »

Les Planteurs Volontaires ont donc une ambition : « réveiller, avec les paysans, ces faiseurs de paysage, le génie des lieux », grâce à la pratique de l’agroforesterie, et en faisant appel à la participation citoyenne pour réaliser les chantiers de plantations.

« Nous participons de la sorte à recréer du paysage et du lien social, à reconstruire des passerelles entre monde urbain et rural, à lutter contre les préjugés et les représentations toutes faites, contre l’agribashing et cela, à partir de l’Arbre et de la Terre »

Alan Guillou, Thierry Luisin et Cédric Macrez, les trois fondateurs des Planteurs Volontaires se sont rencontrés lors d’une première expérience professionnelle commune au sein d’une entreprise de la métropole lilloise. Ils décident en 2013 de déployer leur passion de l’arbre dans le cadre d’une nouvelle association, qui démarrera grâce à un coup de pouce financier du Plan Forêt du Conseil Régional du Nord – Pas de Calais en 2012 et au don d’un mécène.

Planteurs Volontaires groupe
Allan Guillou, Marie-France Wojciechowski, Thierry L...

Analyse de l’action

La richesse agronomique du sol nordiste, qui fut l’un des plus riches au monde, est davantage devenu « support de cultures que matrice du vivant » et le rendement n’est plus au rendez-vous. Les premiers à s’en plaindre sont les agriculteurs. Lors des grandes pluies, plus rien ne retient la première couche de terre ni ne fait barrage aux coulées de boues. Pas la moindre petite haie, pas le moindre talus.

Les Planteurs Volontaires ont pourtant des réponses à apporter, « toutes les solutions aux problèmes sont dans la nature, pour peu qu’on les révèle ». La plupart du temps, ce sont les agriculteurs qui les sollicitent.

Les modalités de fonctionnement reposent sur un système de contrepartie, un partenariat public-privé-citoyens. Les Planteurs Volontaires apportent leur ingénierie, recrutent les bras de bénévoles et assurent un suivi de plantation sur trois ans. En cinq journées - une journée et demi de diagnostic sur le terrain, trois d’ingénierie, une de préconisations, une autre de plantation – un agriculteur peut voir le paysage de son exploitation durablement transformé.

Les agriculteurs, eux, s’engagent à préparer le terrain, assurer la réception des arbres, les mettre en jauge, être présent le jour de la plantation, offrir le gîte et le couvert aux bénévoles pour la pause méridienne de la journée de plantation et assurer la promotion de l’arbre et de ses bénéfices. Qui sont nombreux pour l’environnement et le climat :

  • meilleure fertilité du sol
  • captation et séquestration des intrants fixés par les racines de l’arbre, ce qui peut même contribuer à sa croissance
  • préservation des ressources en eau
  • limitation des coulées de boues
  • renforcement de la biodiversité, de la présence des auxiliaires de culture, d’espèces nourricières pour les animaux
  • confort pour les animaux en pâturage (ombre, fraicheur …)
  • création de nouvelles limites en parcelles et création paysagère
  • création de lien social sur le territoire en question

Ces résultats sont principalement mesurables par les retours des agriculteurs. En parallèle, les Planteurs Volontaires collaborent avec l’Yncréa (regroupement des trois écoles ingénieurs de Lille, ICAM, ISA et ISEN) pour mettre au point des protocoles et des outils de suivi et d’évaluation.

Les arbres, élevés par des pépiniéristes régionaux et de la marque « Végétal local », sont commandés et payés par l’association auprès de l’opération « Plantons le Décor », la démarche des Espaces Naturels Régionaux de valorisation et commercialisation d’essences végétales régionales. On soulignera l’excellent taux de reprise de 98%, réalisé grâce au matériel végétal local utilisé et aux conseils de suivi de plantations ; obligation d’un paillage au pied des plantations pendant un ou deux ans, suivi d’un « laisser faire ou non agir », marque de confiance témoignée dans le génie de la nature. Une gestion pérenne et durable du bocage recréé est attendue par une taille des arbres et des haies non invasive ni abusive.

Plantation Planteurs Volontaires
© Planteurs volontaires

Qui sont les bénévoles qui participent aux chantiers citoyens de plantation ? Quel est le mode de financement qui permet des opérations d’agroforesterie entièrement gratuites pour les agriculteurs ?

Chaque chantier est réalisé par des groupes de planteurs volontaires, bénévoles et habitants du territoire concerné. Cette participation citoyenne se fait en partenariat avec les écoles, les lycées, dont bien sûr les lycées agricoles, les EHPAD, les Instituts Médicaux Educatifs, les détenus, les structures de la Protection Juridique de la Jeunesse, grand public… Bien outillés et accompagnés lors de la journée de plantation, ce sont autant de belles énergies qui font se croiser des personnes qui ne se seraient jamais rencontrées sans leur présence sur les chantiers, œuvrant toutes et tous ensemble pour le bien des arbres, de la terre, du sol agricole.

Les Planteurs Volontaires fonctionnent grâce à des subventions publiques, à leurs prestations de services, au mécénat, aux dons et appels à projets. Cette hybridation de leurs ressources leur permet d’acheter les arbres qu’ils proposent ensuite gratuitement aux agriculteurs, aux collectivités territoriales, aux acteurs économiques s’engageant à leurs côtés dans leur démarche d’agroforesterie.

Résultat

« Les agriculteurs sont devenus aujourd’hui nos meilleurs ambassadeurs, explique Alan Guillou. Ils accueillent leurs confrères sur leur exploitation pour expliquer comment leur démarche d’agroforesterie et ou de replantations de haies est venue à bout de leurs problèmes d’érosion des sols, de coulées de boue …» La preuve par troncs !

A l’instar de ces exploitants, à Flers-en-Escribieux (près de Douai dans le Nord), membres de la FDSEA. Le problème pour eux, c’était l’emprise industrielle des terres voisines par un géant du commerce sur internet. Pour cacher la vue de leur entrepôt logistique, ils ont planté 9 000 arbres sur leur terrain dont un rideau de démarcation entre leurs terres agricoles et celles artificialisées. Au final, cet écran végétal leur a permis de prendre conscience qu’ils s’inscrivaient à nouveau dans la longue filière des faiseurs de paysages, lesquels ont soudain été diversifiés et colorés par les floraisons arbustives et égayés de chants d’oiseaux.

Ou cet autre agriculteur, à Villers-Châtel, dans le Pas-de-Calais, plantant chaque année un kilomètre de haies autour de ses champs. Exploitant en agriculture conventionnelle mais déjà pionnier de la technique du non labour, la présence bénéfique de haies et d’arbres sur ses terres l’ont conduit à poser un nouveau regard sur l’écosystème complet de son exploitation et à apporter des modifications, sensibles mais durables, de ses pratiques agricoles, dont l’agriculture de conservation des sol (ACS).

Climatour #16 : Arbres en agriculture : solutions pour le climat - Santerre

Durée: 07:30

Découvrez les différentes facettes de l’agroforesterie à travers deux visites dans le Santerre : GIE des Beaux Jours à Marcelcave et Ferme des Deraeve à Bayonvillers.

Avec l'intervention de :

. Alan GUILLOU, responsable et co-fondateur de l'association Planteurs Volontaires

. David GRANDGIRARD, enseignant-chercheur à UniLaSalle Beauvais

. Regis WARTELLE, chef de projet Paysage et Biodiversité à la Chambre régionale d’Agriculture HdF

. Emmanuel LEVEUGLE, élu à la Chambre régionale d’Agriculture HdF

. Sylvain DERAEVE, agriculteur à l'EARL Plaine de Vie, Bayonvillers

. Jean-Philippe JEANSON, agriculteur au GIE des Beaux Jours, Marcelcave

. François BOISLEUX, animateur ENR - Qualité de l'air & Adaptation au changement climatique à l'Ademe HdF

Depuis la création de l’association, plus de 134 000 arbres ont été plantés par quelques 7 945 planteurs volontaires lors de 192 chantiers.

L’avenir et le développement des Planteurs Volontaires passent encore et toujours par la contractualisation de nouveaux chantiers mais également par :

  • la formation des agriculteurs à la taille des arbres grâce à un partenariat avec le CIVAM
  • la récolte des graines d’espèces végétales arbustives dans des espaces naturels protégés, « pour conserver les caractères d’adaptation de ces espèces et faire le pari du génie végétal face au changement climatique »,
  • la coopération continue avec les GEDA et des partenaires comme l’association, Terr'Avenir les lycées agricoles, les fédérations professionnelles, les communautés de communes pour les plans de gestion des sols

Les Planteurs Volontaires sèment ainsi des arbres mais aussi les graines d’un nouveau regard sur l’usage de la haie et de l’arbre dans un système agricole en train d’évoluer pour le mieux être de tous. Enthousiasmant !

Ce qu’il faut retenir :

« Nous sommes arrivés à un moment où il est temps de questionner notre manière d’être vivant, et cette interdépendance des êtres humains vivant dans ce monde avec d’autres êtres vivants. »

En quoi cette initiative est bonne pour l’adaptation au changement climatique ?

En associant sur une même parcelle arbres et cultures, cette action contribue à la régénération des sols, au retour de la biodiversité, à la réduction des engrais et pesticides, tout en produisant de la biomasse et en participant donc au stockage de carbone. Mais c'est aussi une mesure qui apporte de l'ombre, protège du vent, réduit l'érosion sur les parcelles cultivées,... bref contribue à l'adaptation du système agricole et des territoires ruraux au changement climatique. À ces bénéfices agronomiques des plantations participatives s’ajoutent les bénéfices en termes de lien social sur le territoire.

Fiche d’identité

Titre de l’opération : Agroforesterie citoyenne et participative

Lieu/Échelle de l’action : région des Hauts-de-France

Identification du porteur de projet : Association Les Planteurs Volontaires

Contact : Alan Guillou, responsable des Planteurs Volontaires, 5 rue Jules de Vicq Fives 59000 Lille Tél : 06 14 39 57 83 Mel : contact@planteurs-volontaires.com

Partenaires : Conseil Régional des Hauts-de-France

Date de création : 2013

Bénéficiaires/cibles de l’action : agriculteurs, collectivités…

Infos sur le projet :

Site internet des planteurs volontaires

Bilan de la saison 19/20

    Objectifs de développement durable

  • 13. Lutte contre le changement climatique
  • 15. Vie terrestre
  • 2. Faim « zéro »

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